Pour le dire bref, jamais au 18ème avant Rousseau on ne trouve d’expression de la conscience malheureuse. On est malheureux parce que telle ou telle chose vous arrive, deuil, ruine, échec, mais pas simplement du seul fait de vivre. Il faudrait remonter à Marc Aurel (temps de crise…) pour retrouver quelque chose de semblable, encore Marc Aurel a-t-il en vu la sagesse. Il a un but. Mais en tous cas du 12 au 18 ème inclus (sauf Rousseau, et c’est bien pourquoi il est la clef de notre modernité) on ne trouve qu’individus cherchant le bonheur.
Et si vraiment on cherche autre chose on se fait moine. Les choses n’ont guère changé : il y a ceux qui chantent le progrès et ce qu’on a obtenu, ce qu’on va obtenir et clament qu’il serait stupide de s’angoisser quand la vie a de telles cadeaux à offrir, et il y a ceux qui se sentent mal dans un monde d’où « dieu s’est enfui » comme l’a écrit Heidegger. Voilà un nom qui s’impose : car pour Heidegger nous vivons bien dans cette époque où la technologie est – à ses yeux- une métaphysique ou plus exactement la traduction d’une métaphysique en acte, une métaphysique qui traduit le retrait de l’etre et une perte du sens par rapport aux pré-socratique. Le temps de l’anxiété. On est quand même en droit de se poser la question : pourquoi Kierkegaard, pourquoi après lui Heidegger, pourquoi Ionesco, Kafka, Becket et toute l’école de l’absurde?
--
Le matérialiste, c’est celui qui considère que la matière compte, qu’elle est autre chose que rien, qui ne lui oppose pas l’esprit. En d’autres termes, qui considère que le corps prime sur l’esprit individuel, et qu’en tant qu’il est matériellement dépendant du collectif, il en est la propriété. Que les tracasseries de la chair engagent le destin de la communauté, qu’elle y a droit de cité, que l’esprit responsable doit lui en rendre compte.
Voilà pourquoi les millénaristes, à toutes les époques, s’occupent en premier lieu du trou de balle de leur prochain. Si nous devons aujourd’hui faire valoir notre égoïsme, c’est précisément pour maintenir l’ascendant de l’esprit, dont l’individu est le seul vecteur. Pour perpétuer la civilisation (du moins telle qu’on la conçoit en terre chrétienne).
Archives
-
▼
2011
(70)
-
▼
avril
(13)
- Films avril 2011
- Civilisation européenne sur le déclin - Ilys
- Ecole publique en monopole, école privée libre
- Mélancolie et égoïsme dans le déclin de l'Occident...
- Finkielkraut et Fumaroli sur l'ère culturelle cont...
- L'importance d'être un petit-bourgeois - Nabe
- Les pauvres s'achètent une télé, et ne se nourriss...
- Décalages sur l'apparition des sentiments - Merleau
- Loi de Hamilton : altruisme et évolution
- L'ignorance généralisée du langage informatique
- La religion comme remède aux angoisses de l'intell...
- Les niveaux chez Pascal
- Les "gardiens de vaches diplômés" - Xp
-
▼
avril
(13)