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samedi 25 juin 2011

Guerroyer en philosophie avec Sartre - par Bhl

Il y a deux façons de lire un philosophe :

- celle des professeurs, respectueuse de ce qu'il a dit, fidèle au vrai corps de sa doctrine, logique, attentive à bien retrouver l'ordre de se raisons et de son système.


- celle des philosophes, (donc des écrivains) qui ne se réclament de la pensé d'un autre que parce qu'ils n'ont pas encore le moyen d'oser affirmer la leur, l'assumer, penser en leur nom. Lecture sauvage, alors. Lecture de pillard, de guerrier. Lire la pensée d'un aîné pour y trouver la sienne en gestation. Se faire des idées personnelles à ses dépens jusqu'à tomber dans un cul-de-sac. Citer Husserl ou Heidegger pour y prélever des traits , des armes, des renforts. Les corriger l'un par l'autre. Les opposer, tous deux, à Hegel. Tant pis si l'on manque le sacro-saint mouvement de la pensée citée. Tant pis si l'on déshistoricise le sens de cette pensée. On entre dans le grands morts comme dans un moulin. On prend dans la pensée d'autrui, mort ou vivant, la matière de sa propre pensée, jamais tout à fait finie.


-- repris de "Le siècle de Sartre", de BHL (page 135).


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Engagé, en 1944 dans Qu'est-ce que la littérature? - pour Sartre, ça veut d'abord dire 'conscient du pouvoir de la parole'. Et non cette police de la pensée qu'il exercera plus tard.

Le concept d'engagement n'est pas un concept politique insistant sur les devoirs sociaux de l'écrivain; c'est un concept philosophique désignant les pouvoirs métaphysiques du langage.