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mercredi 22 août 2012

Notes de lecture sur Fukuyama


Fukuyama:

"La fin de l'histoire et le dernier homme"

Hegel refuse d'avoir un "nature humaine", l'homme est libre et non déterminé.
Le premier homme de Hegel diffère des animaux en ce qu'il a besoin de reconnaissance, d'être reconnu "en tant qu'homme". La première rencontre entre les hommes s'effectue ainsi sous l'égide violente d'une lutte pour être reconnu, ce qui aboutit à un maître reconnu et à un esclave reconnaissant le maître en tant qu'homme (en fait: en tant que maître, et c'est bien là le départ de la dialectique hégélienne).
Le problème d'une société stable est de satisfaire à la fois les maîtres et les esclaves dans leur désir de reconnaissance.

Mais la conscience de l'esclave est plus réflexive que celle du maître car elle doit se penser 'dominée', elle doit penser la liberté d'un point de vue abstrait (la liberté virtuelle, en devenir) avant d'en jouir en réalité. L'esclave, nous tous, doit inventer les principes d'une société libre avant d'y vivre. L'esclave ne défit pas son maître soudainement, il y a d'abord un long travail d'auto-éducation pour surmonter -tout d'abord- sa crainte de la mort.
Les idéologies pour Hegel et Marx sont donc ce qui reflète la conception de la liberté, l'état de réflexion des esclaves sur leur système d'oppression. Le stoïcisme puis le christianisme sont des modes d'analyses de la liberté. Le christianisme, bien sûr, étant la première idéologie produisant l'idée que tous les hommes sont égaux sous le regarde de Dieu.

Le libéralisme américains et ses théoriciens (depuis Hobbes et Locke jusqu'à Jefferson) dit : nous reconnaissons la dimension "désir de reconnaissance" chez l'homme. Mais une bataille de pur prestige hégélienne doit paraître irrationnelle à l'homme qui défend premièrement les premiers instincts de préservation de soi. L'enjeu du politique étant de persuader tout apprenti-maître (donc potentiellement violent car prêt à se jeter dans une bataille de pur prestige) qu'il vaut mieux accepter une vie d'esclave dans une société d'esclaves sans classes.

Le communisme a beaucoup plus utilisé la partie 'thymonique' de l'homme. Il a humilié les gens ordinaires en les contraignant à des compromissions morales : obligations de signer des pétitions, silence devant les persécutions. Tout le monde était complice, grâce à l'agitation de biens de consommations primaires. Il offrait une vie meilleure en échange d'une compromission de leur dignité morale.

Le passage à la société libérale bourgeoise, c'est la victoire éthique du mode de vie bourgeois sur la vie 'thymotique' (désir de gloire, prêt à se sacrifier à la guerre en même temps qu'une interdiction de travailler) des l'aristocrate noble.
On arrive donc à des sociétés composées d'hommes sans courage (C.S Lewis), hommes faits de raison et de désir mais dépourvus d'une fière affirmation de soi-même (thymos, désir d'être reconnu, désir d'être meilleur que l'autre etc.). Ce que, évidemment, Nietzsche critiquera : on préfère le profit personnel à la gloire dans cette civilisation occidentale bâtie pour les bourgeois contre les guerriers nobles.

Le "libéralisme hégélien", c'est l'idée que nous devons être à la fois autonome, et 'reconnus' par tous. La démocratie étant un frein à l'efficacité économique, elle est en fait là pour satisfaire le besoin de reconnaissance.

Nietzsche définit un peuple comme une communauté morale : partageant les même idées du bien et du mal. Le désir de reconnaissance, le thymos, est le siège des valeurs : est 'digne' celui qui respecte un tel ou un autre, est 'indigne' celui qui mange cet animal etc.

Capitalisme et 'cultures locales'. En Inde, Myrdal décrit l'interdiction de tuer et d'utiliser les vaches pour l'économie (ainsi que, plus généralement, l'hindouisme) comme une force d'inertie sociale-économique.
Au Japon, le thymos, la reconnaissance, se fait par les pairs, le groupe. On ne travaille pas (seulement) pour la reconnaissance à court terme qu'est le salaire, mais aussi pour la reconnaissance par le groupe, et des autres groupes sur le notre.
La compétition économique internationale n'oppose plus des idéologies -car on sait ce qui marche- mais des cultures différentes. C'est à dire des manières 'irrationnelles' d'appréhender, par exemple, le travail (reconnaissance de la société pour le travailleur, lien entre le travailleur et la firme etc.)


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"The Origins of Political Order"

Un groupe social qui utilise le langage avant un autre peut l'utiliser pour détecter (ou utiliser) le mensonge. Et devient donc un groupe dominant.

La religion peut être vue comme un moyen de respecter des accords, ou en d'autres termes, d'éviter des passagers clandestins. Le pouvoir symbolique des religieux fait qu'un agent rationnel va parfois respecter des lois tacites par peur des forces irrationnelles et invisibles. Le sens même de la honte est plus fort si l'on croit en des esprits omniscients qui nous jugent sévèrement.