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vendredi 12 décembre 2014

Fictions

Une fille enregistre deux beaufs parler entre eux. 

Un groupe de trois filles au café, elles discutent du message à la virgule près que l'une d'elle doit envoyer à son mec, en instance de séparation.

Un type dans un couloir tente de convaincre une fille, le héros passe par là en entrant chez lui. 

La question du périmètre autour d'un moi.
A quel point nous étendons notre moi autour, combien de mètres pour nous sentir bien, non-agressé. (cf. Robert T. Hall)

Étudier les stratagèmes mis en œuvre par les gens pour survivre : ce qu'on ignore, ce qu'on laisse passer, ce qu'on trouve indigne. A chaque classe sociale ses catégories de stratégies pour se rendre la vie facile.

Kafka chez Perec : Ne pas arriver à trouver une place idéale (la bonne place) à son thermostat tout neuf. Le mettre partout dans la maison et constater que la température monte pour rien.

Ce que c'est que d'attendre une réponse à un message électronique. Ce n'est ni la lettre, ni l'appel de nos parents, c'est une tension du corps vers l'objet pour se incruster et sentir le plus vite possible l'objet qui vibre, très sensuelle ment, dans notre poche. 

Titres : "par l'exemple" pour insister sur le matérialisme, sur l'intérêt du concret et du sensible. 
"Ce qu'est le bilan", cf. un manuel de comptabilité.

Filmer un homme qui ne veut pas écrire, qui est contre l'écrit comme mode narratif. Défense du cinéma comme médium : regardez ce qu'on peut y faire, en image, archives, son surdimensionné, musique, effets, ralentis.

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Un type réalise qu'il a la braguette ouverte depuis le début de sa journée. Et doute. 

Une conversation d'une fille qui vient d'avoir ses résultats, parle du bonheur apporté dans sa famille par sa validation. Moi jangoisse d'être ainsi amené de force dans sa vie, d'être forcé à la sympathie avec ces anecdotes qu'elle crie dans le wagon. Je suis obligé d'en être de sa famille à elle, et, non qu'elle me déplaise physiquement, je ne suis pas encore prêt à m'engager autant avec une telle inconnue...

Je n'aime pas partager de l'intimité avec untel contre un autre qui a ma préférence. Lorsque un vieil ami dont j'ai honte me regarde avec complicité croyant s'unir avec moi contre un troisième que je préfère tant. Le troisième comprenant qu'il affronte une foule, se sent attaqué alors que je ne souhaite rien de plus que de prendre son parti. Mais le regard du vieil ami me force à être son intime du fait que, malgré moi, je comprends son allusion très médiocre à une conversation passée ou à une de ses opinions superficielles. 

Rien n'est plus pénible que d'être ramené de force dans l'intimité d'un demi habile. 

" — Mon fils a très bien réussi, il va souvent à New-York."

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Ecrire un roman, c'est mettre des frontières à un monde. C'est délimiter de l'espace social. C'est choisir où est la limite à l'intérêt d'une "histoire" donnée. À partir de quel détail l'histoire n'a plus de sens, ou l'histoire perd son sens. 

Au fond, une grande détestation de moi même, car je n'adhère pas assez à la vie sociale comme je sais qu'il le faut pour que la civilisation perdure et progresse. Je déteste en moi l'attitude artiste. Mais je n'y peux rien. Je n'arrive pas à me comporter comme je sais qu'il est moral et bon de le faire. Je ne veux ni travailler comme salarié, ni créer de famille, ni respecter le sacré qui pourtant devrait faire liant.
L'aristocratie alors ? Ne pas se plier aux lois qu'on sait bonnes, qu'on pourrait défendre par tous les arguments possibles.
Comment justifier, comment faire sens, du coup, même en tant qu'artiste puisqu'on ne respecte pas la loi de la cohérence, du sens, de l'adéquation d'avec nos valeurs.
Se sentir coupable (aux yeux de qui ?) à force de ne pas se conformer au modèle que je sais optimal pour le bonheur collectif.
Rester individualiste et disciple de Mandeville jusqu'au bout : je ne m'intéresse pas aux autres, mais à moi seul. Mais alors, comment oser faire discours sur les choses sociales puisqu'on refuse toute participation, tout souci, toute attention portée au collectif ?
J'ai l'impression de choisir la facilité en ne me confirmant pas au modèle que j'estime bon pour le progrès. L'artiste en moi c'est celui qui botte en touche, celui qui ne veut pas jouer dans les règles. Lâche.

Quand on parle de l'art comme émancipation. Il faut s'intéresser à la misère d'une vie quotidienne. Pour comprendre en quoi l'art est loin d'être la priorité vers laquelle on se tourne. Ou disons que ça n'est pas automatique. Dépressif je ne songe pas à l'art. Je cherche justement un moyen d'y retourner. Mais l'art ne me sauve pas. Au contraire, l'art me rend triste par son absence. Parce que c'est "faute d'art" que je suis triste, on peut considérer l'art comme quoi ? Une meta-raison d'exister ?