mercredi 13 juillet 2011

Maupassant contre la fête du 14-juillet

14 juillet. – Fête de la République. Je me suis promené par les rues. Les pétards et les drapeaux m’amusaient comme un enfant. C’est pourtant fort bête d’être joyeux, à date fixe, par décret du gouvernement. Le peuple est un troupeau imbécile, tantôt stupidement patient et tantôt férocement révolté. On lui dit : « Amuse-toi. » Il s’amuse. On lui dit : « Va te battre avec le voisin. » Il va se battre. On lui dit : « Vote pour l’Empereur. » Il vote pour l’Empereur. Puis, on lui dit : « Vote pour la République. » Et il vote pour la République.

Ceux qui le dirigent sont aussi sots ; mais au lieu d’obéir à des hommes, ils obéissent à des principes, lesquels ne peuvent être que niais, stériles et faux, par cela même qu’ils sont des principes, c’est-à-dire des idées réputées certaines et immuables, en ce monde où l’on n’est sûr de rien, puisque la lumière est une illusion, puisque le bruit est une illusion.

(Le Horla)

jeudi 7 juillet 2011

Opposition entre libertariens et conservateurs

La première différence réside dans la façon contrastée par laquelle les deux groupes perçoivent la population. Les conservateurs, depuis Burke, ont eu plutôt tendance à voir la population à la manière des légistes du Moyen-âge ou des philosophes réalistes (en contraste avec les nominalistes) : composée directement non pas par les individus, mais par les groupes naturels dans lesquels ces mêmes individus vivent invariablement : la famille, la localité, l’église, la région, la classe sociale, la nation, etc.
Bien entendu, les individus existent mais ils ne peuvent pas être considérés comme des identités sociales distinctes de ces groupes. La Révolution, – au nom de l’individu et de ses droits naturels, a souvent détruit ou diminué les groupes traditionnels – les guildes, l’aristocratie, la famille patriarcale, l’Eglise, l’école, les provinces, etc. que Burke considérait comme étant les molécules irréductibles et constitutives de la société. En effet, ils soutenaient que c’est la pulvérisation de la société en un tas de sable composé de particules individuelles, revendiquant chacune des droits naturels, qui rendait inévitable l’apparition du nationalisme collectiviste.


Je crois qu’un état d’esprit se développe au sein des libertariens dans lequel les coercitions de la famille, de l’église, de la communauté locale et de l’école semblent aussi hostiles à la liberté que celles du gouvernement politique. Si c’est le cas, le fossé se creusera certainement encore plus entre les libertariens et les conservateurs.

Il est certain, et cela est pleinement reconnu par les conservateurs, qu’il existe un degré de liberté en deçà duquel aucune création significative ne peut être réalisée. Sans ce degré de liberté, pas de Shakespeare, pas de Marlowe, pas de Newton. Mais ce que diraient les conservateurs, c’est qu’on se rend moins souvent compte qu’il existe un degré de liberté au delà duquel aucune création significative ne peut être réalisée. Les écrivains de la fin du XXème siècle ont composé leur œuvre littéraire dans l’air le plus libre qu’ils aient jamais respiré.
En revanche, les libertariens semblent voir l’autorité sociale et morale et le pouvoir politique despotique comme un élément d’un seul spectre, comme une continuité ininterrompue. Selon leur argument, si nous voulons éviter le Léviathan, nous devons remettre en cause n’importe quelles formes d’autorité, y compris celles qui sont inséparables du lien social.

L'association restera compliquée parce que les conservateurs continueront à soupçonner l'idéal d'émancipation des libertariens de préparer le terrain aux socialistes tandis que les libertariens continueront à soupçonner les conservateurs de vouloir imposer leurs vues morales par la coercition.

vendredi 1 juillet 2011

Un Foucault de droite - freejazz

Foucault s'intéresse aux paradigmes du pouvoir, il montre un changement très intéressant dans la nature même du pouvoir que les libéraux n'ont pas intégré dans leur critique qui reste centrée sur la Raison d'Etat, alors que le pouvoir n'est plus vertical et univoque, mais horizontal et multiple, il s'applique désormais par des techniques de gouvernance dont il avait anticipé le fonctionnement.

Sa légitimité ne consiste plus dans le monopole de la violence légale en vue d'assurer la sécurité du territoire, mais dans la biopolitique, c'est-à-dire la gestion de la santé physique et mentale des populations par la production de normes prophylactiques, hygiéniques, comportementales. Foucault permet ainsi de penser le mécanisme de sujétion qui est à l'oeuvre dans la judiciarisation de la société et la prise en charge des normes par des experts de tous poils qui transforme les frontières du licite et de l'illicite, du normal et du pathologique.